Adhérer à « Dallas Buyers Club »

ImageÊtre atteint du Sida, cette « maladie de tapette » ? Impensable pour ce Texan de Ron Woodroof (Matthiew  McConaughey, Golden Globe du meilleur acteur drame), homophobe jusqu’aux tripes, dont la vie est régie par la drogue, le sexe, et le rodéo. Et pourtant. On est en 1985 et les médecins ne donnent plus que trente jours à vivre à cet électricien de Dallas. Il aurait pu épouser la fatalité. Il a choisi le combat. Et en a fait un business : le « Dallas Buyers Club ».

Tiré d’une histoire vraie, le film est un hymne à la vie. La mort est là, pesante, physique, les corps rachitiques – McConaughey a perdu vingt kilos pour le rôle.  C’est la lutte d’un homme contre la maladie, contre le système, qui est dépeinte sans sentimentalisme : la matière se montre abrupte, crue, ultra-réaliste. Ce Ron Woodroof a tout de l’anti-modèle hollywoodien. Cowboy macho, antipathique,  sa première réaction est saisissante quand il apprend qu’il est atteint du Sida : « Je ne suis pas une pédale ». La mentalité du personnage dérange, écœure. Sa métamorphose séduit. D’homophobe invétéré le voilà activiste contre le sida, tolérant, ouvert aux autres, mais sans tomber dans le profil mièvre et fragile. Ron reste une brute, mais une brute avec du cœur. Sans pour autant en perdre le sens des affaires. En effet, alors qu’il accuse les laboratoires pharmaceutiques d’intoxiquer les patients séropositifs avec de l’AZT alors au stade expérimental -où l’humain se fait cobaye-, Ron se tourne vers des remèdes qu’il importe du Mexique, et en fait profiter les clients du « Dallas Buyers Club » pour la somme mensuelle de 400 dollars par personne. Mi-héros mi-dealer, bienfaiteur opportuniste, Ron Woodroof endosse le costume du défenseur d’une cause fondamentale : celle  «du droit de chaque individu de contrôler ce qui est introduit dans son corps ».

Le réalisateur canadien Jean-Marc Vallée fait de « Dallas Buyers Club » non pas un plaidoyer contre l’homophobie, non pas une ode à la tolérance – contrairement au « Philadelphia » (1993) de Jonathan Demme -, mais l’histoire d’un homme face à la maladie. Le contraste entre le personnage principal Ron Woodroof et son antagoniste Rayon (Jared Leto, Golden Globe du meilleur acteur dans un second rôle), son bras droit transsexuel à fleur de peau du « Dallas Buyers Club », apporte toute la puissance au récit.  Opposés mais complices, les deux acteurs se complètent, dans une improbable alchimie,  jusqu’à devenir le nerf sensitif du film. Un duo exceptionnel voué aux Oscars.

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